Depuis le 15 février 2016, la compagnie Polonaise Geofizyka-krakow est au Sahara Occidental occupé. L’entreprise annonce sur son site web qu’elle mène ses activités au Maroc en contrat avec l’ONHYM, Office national des hydrocarbures et des mines de l’État marocain.
En recoupant nos sources, la zone concernée par les activités de l’entreprise polonaise d’enquête sismique est une vaste zone dont la diagonale serait l’axe Boucraa – Boujdour. Cette zone, entre les villes de Semara. El Aaiun, Boujdour. et Gueltat Zemmour, est au Sahara Occidental, et non au Maroc.
Les activités sur les ressources naturelles dans le Sahara Occidental, dit territoire non autonome par l’ONU, sont conditionnées en droit international à la volonté du peuple sahraoui, – donc sa consultation et son accord -, et à son bénéfice. Il n’en est rien dans le cas présent, et cela rend illégale la présence de l’entreprise polonaise.
Selon nos recherches, les activités correspondent à l’appel d’offres ouvert sur offres de prix n°26/2015 du 30/07/2015, « prestations d’acquisition et de traitement des données sismiques 2D (zone de Lemsid) », proposé par l’ONHYM pour le gouvernement marocain, qui occupe militairement la partie ouest de notre pays. Voir le document de l’appel d’offre ici.http://ao.onhym.com/Documents/AO%2026-2015%20-%20CPS%20SIGNE.pdf
La recherche sismique est prévue en 7 lignes quadrillant la zone, soit un total selon l’appel d’offre de 950km d’étude sismique, que l’entreprise a 330 jours pour réaliser.
La première des lignes à être étudiée va de Kdayyat Essba’a vers Lmsyed près de la côte atlantique, au nord de Boujdour, soit environ 200 km. La 2ème va de Lemsyed vers Lgelta.
Les opérations de préparation du terrain et repérage ont donc commencé le 15 février, après une semaine de rapide vérification par l’armée marocaine des risques liés aux mines terrestres et restes de guerre. Après la période des tests, l’étude sismique a officiellement commencé le 17 mai.
Sur place sont présents près de cent personnes, des employés polonais, et marocains de l’entreprise, des Sahraouis et Marocains en contrat de sous-traitance pour des tâches subalternes, et l’armée marocaine. Il semble que l’Onhym soit l’intermédiaire entre ces différentes entités.
Au niveau matériel mobile, il y a 7 grands camions blancs d’études sismiques (camion vibrateur sismique) sans immatriculation, 2 petits camions orange, de maintenance des camions blancs et l’autre dit «le labo» de réception des données vibrationnelles, et 52 véhicules 4×4.
A Boucraa, la société polonaise a installé, avec l’aide de l’armée marocaine, un quartier de 10 bungalows préfabriqués destiné à loger dans un premier temps les chauffeurs et les employés nettoyeurs, Sahraouis et Marocains. Chaque préfabriqué doit servir pour 10 personnes. Une cuisine, avec une salle de restauration, gérée par une équipe de cuisiniers et aides assure l’intendance de toute l’équipe.
C’est dans ce quartier que sont garés les véhicules de transport et d’étude de l’entreprise, et stocké le matériel.
Le quartier est entouré d’un mur de sable puis d’un grillage.
Les employés polonais et marocains, dans un premier temps logés dans des maisons luxueuses appartenant à l’OCP (Office Chérifien des Phosphates) dans la ville de Boucraa ont rejoint le reste du groupe dans le quartier préfabriqué le 22 mai 2016, ainsi que le bataillon des FAR chargé de leur sécurité.
L’organisation de l’étude sismique
Le groupe chargé du nettoyage du terrain doit enlever à la main toutes les pierres présentes sur le tracé de l’étude sismique sur une largeur de 6 mètres, ensuite marquer le terrain à l’aide de sacs de sable, et fixer au sol les géophones reliés avec des câbles, soit pas loin de 300 géophones par jour. Ce sont les topographes qui identifient les endroits précis ou sont posés les sacs et installés les géophones.
Cette équipe devait initialement sous le contrôle de chefs marocains nettoyer et marquer 3 à 4 kilomètres par jour. Une récente demande de l’entreprise polonaise que cette charge passe à 9 km par jour dans les mêmes conditions (nombre de personnes, salaires…) a déclenché des réactions et des mouvements de grève, quand les conditions de travail n’étaient déjà pas satisfaisantes. Cela fera l’objet d’une information plus précise ultérieurement.
Depuis le 17 mai, viennent ensuite 3 des 7 camions blancs, qui se déplacent doucement vers les places identifiées, démarrent en même temps tous ensemble et avancent à une allure de 5 km/h pour entreprendre les relevés sismiques qui seront étudiés ensuite.
L’équipe de travail au 30 mai 2016*.
51 sahraouis sont embauchés sans contrat par Logisteam pour 3 mois, chauffeurs des différents personnels, selon une prestation 4X4 avec chauffeur, payé 13000 dh soit 10000 dh pour le véhicule et 3000dh pour le chauffeur. Ils travaillent 12h par jour sans repos hebdomadaire. La maintenance des véhicules et le gasoil sont à la charge de la société polonaise.
Un chauffeur marocain dans le même groupe est venu de Casablanca avec un véhicule 4×4 de location immatriculé dans cette même ville. Ses conditions de travail et employeur ne sont pas connus de nos sources.
6 chauffeurs marocains conduisent les camions blancs et orange. Ils ont signé des contrats avec Logisteam et ne bénéficient pas de repos hebdomadaire.
50 hommes, soit 20 sahraouis et 30 marocains, embauchés pour nettoyer et baliser le terrain sont sous contrats avec Afrique Partenariat pour 3 mois, pour 12h de travail quotidien, sans repos hebdomadaire, payés 3000 dh (235 euros) par mois. Ils sont logés sur la base et nourris.
6 topographes marocains, employeur et contrat inconnu de nous à ce jour, travaillent 12h chaque jour sans repos hebdomadaire. Ils sont logés et nourris au camp.
20 Polonais, soit un directeur de projet, 2 chargés finances et caisse, et 17 ingénieurs sont logés nourris sur la base et n’ont pas de repos hebdomadaire.
16 cuisiniers marocains travaillent 12h par jour sans repos hebdomadaire et logent à la base préfabriquée. Employeur et salaires inconnus de nos sources.
2 aides cuisine sahraouis, en contrat avec Afrique Partenariat, travaillent à la base préfabriquée 12 heures par jour, sans repos hebdomadaire, pour un salaire mensuel de 3000 dh/mois, logement au camp.
Pour l’entreprise Logisteam, les recrutements ont été assurés sur place par le codirigeant de l’entreprise, Yahdih Sidi Youssef, un entrepreneur sahraoui expérimenté dans le secteur étude sismique depuis qu’il a travaillé avec des compagnies de prospection pétrolière sur la zone Zag au sud du Maroc. Le siège de l’entreprise Logisteam est à Casablanca.
L’armée d’occupation
L’armée marocaine sur place compte deux bataillons de 10 personnes.
L’un sous le commandement d’un adjudant est chargé des Polonais. Les soldats chacun avec son fusil M-16 se déplacent avec les Polonais seuls ou en groupes pour assurer leur sécurité. Ils logent et sont nourris dans le quartier de préfabriqués de l’entreprise.
L’autre groupe des FAR, indépendant, commandé par le capitaine Cotto est un groupe spécialisé en déminage. Ils sont chargés de décontaminer les 7 lignes définies pour l’étude sismique. Ils logent et sont nourris dans un camp à quelques km de Boukraa. Selon nos sources, leur travail est attaché au gouvernement marocain et non à la société polonaise. Selon des témoins ils sont équipés de matériel détecteur de métaux du type «poêle à frire».